
C’est en mourant que saint Martin, fêté en ce jour, prononça ces quelques mots qui furent ses dernières paroles, avant de parvenir à la Béatitude dans ce face à face avec Dieu qu’il servit si bien ardemment depuis sa tendre jeunesse.
Ces mots sont un appel précis pour tous ceux qui suivent le Christ, depuis leur baptême.
Par le baptême en effet nous devenons enfants de Dieu et ainsi nous sommes conviés à travailler dans la vigne du Seigneur, quelle que soit l’heure à laquelle nous sommes appelés (Mt 20, 1-16).
Par la confirmation notre devoir de chrétiens s’affine puisque nous sommes alors constitués soldats de Jésus-Christ. Fortifiés par les dons du Saint-Esprit, nous sommes invités à travailler avec plus d’ardeur encore, car nous sommes devenus adultes dans la vie spirituelle. Finis les balbutiements de l’enfance. Le combat nous appelle à lutter contre la triple concupiscence : « Car tout ce qui est dans le monde, à savoir la convoitise de la chair, la convoitise des yeux et l’orgueil de la vie » (1 Jn 2, 16).
Nourris par la sainte communion, le travail de notre sanctification est rendu sinon plus facile, du moins nous l’accomplissons avec joie puisque nous sommes des porte-Christs après avoir reçu en nous la Vie divine, le Verbe fait Chair.
Par la pénitence nous nous relevons de nos chutes, car nous avions arrêté notre travail de sanctification, stoppée totalement par le péché mortel, ou du moins ralentie par nos fautes vénielles où la charité s’amoindrissait peu à peu en nos âmes, boîtant ainsi dans notre course vers Dieu. Le sacrement ranime notre ardeur !
A l’heure de mourir, nous recevrons avec piété le sacrement de l’extrême-onction, prêts à remettre dans les mains du Père notre âme (Lc 23, 46) et, s’il le faut encore pour un certain temps, nous dirons comme saint Martin : « Seigneur, si je vous suis encore nécessaire, je ne refuse pas le travail. »
Les époux eux-mêmes sont conviés, et combien, à répéter souvent la parole du saint de Tours… Les enfants que Dieu leur confie dans sa bonté sont l’objet des soins de leurs parents. Si la santé du corps avec tout ce que cela comporte est importante, celle de l’âme l’est plus encore. Le but premier du mariage n’est-il pas la procréation et l’éducation chrétienne des enfants ? Le concile Vatican II a inversé l’ordre des fins de ce sacrement, et l’on voit toutes les dérives, non dites mais bien réelles et qui en sont les conséquences (contraception, avortement…). Ces époux ont refusé le travail, pour satisfaire leur égoïsme. Bienheureux plutôt les parents chrétiens qui accomplissent fidèlement leurs devoirs d’époux et de parents, malgré les difficultés, les épreuves, les échecs parfois, les larmes souvent…
Par le sacerdoce bien entendu, le baptisé, confirmé doit travailler au Règne de Dieu. Saint Martin fut prêtre puis évêque et c’est surtout aux prêtres et aux évêques qu’il est demandé de « ne pas refuser le travail » : à la conquête des âmes ! Ce labeur est souvent humble et caché : ces heures passées au confessionnal, à conseiller, à consoler, à reprendre et encourager, ces longs moments donnés pour catéchiser, de l’enfance à l’âge adulte, les fidèles assoiffées de vérité, surtout ces moments passés devant Celui qui Est, dans l’adoration silencieuse qui féconde tout l’apostolat des ministres du Dieu vivant.
Mon Dieu, donnez-nous de ces âmes qui ont soif de Vous !
Selon la parole de l’apôtre, l’évêque particulièrement (Timothée était évêque) doit être « dur à la fatigue comme un bon soldat du Christ (…) ; le laboureur commence par travailler avant de récolter des fruits » (2 Tim. 2, 3 et 6).
Mon Dieu, donnez-nous des prêtres et des évêques prêts à œuvrer avec zèle, remplis de la vraie charité qui par elle-même est patiente et remplie d’espérance (1 Cor 13, 4 et 7), combat l’erreur sous toutes ses formes (2 Tim. 1, 1-5).
Dieu sait si les erreurs pullulent de nos jours : il nous faut des prêtres et des évêques tellement épris de la Vérité qu’est Dieu qu’ils affirment la doctrine et la morale sans craindre les hommes, le qu’en-dira-t-on des bien-pensants, qu’ils ne craignent pas de perdre éventuellement leur situation confortable dans la société sacerdotale ou religieuse à laquelle ils appartiennent.
La Vérité ne se brade pas.
Abbé Dominique Rousseau
En la fête de saint Martin 2023