
La question agite souvent les esprits : comment tout ce qui existe a-t-il pu être réalisé en si peu de temps ?
Voici ce que le 30 juin 1909, sous saint Pie X, nous rapporte la Commission biblique :
« Les divers systèmes d’exégèse, imaginés et soutenus sous des couleurs scientifiques pour exclure le sens littéral des trois premiers chapitres du livre la Genèse, sont-ils fondés ? Réponse : non. »
« Bien que, en écrivant le premier chapitre de la Genèse, l’auteur sacré n’ait pas eu l’intention d’enseigner scientifiquement la nature intime des choses visibles et l’ordre complet de la création, mais plutôt celle de donner à sa nation un récit populaire conforme au langage ordinaire de ses contemporains et adapté à leurs idées et à leur intelligence, faut-il, dans l’interprétation de ces choses, rechercher exactement et constamment le caractère propre du discours scientifique ? Réponse : non. ».
Forts de ses avertissements, engageons-nous dans un aperçu succinct de ce que peuvent nous rapporter quelques Pères de l’Eglise et une exégèse possible sur les six jours de la création.
¨ Les « jours » dont il est question ne sont pas forcément des jours de 24 heures mais des périodes. La commission biblique laisse la liberté de discussion à ce sujet : « Il y eut un soir, il y eut un matin… » indiquerait la limite de ces périodes.
Saint Augustin diffère des autres Pères de l’Église pour dire que les sept jours manifestent seulement un ordre de choses, connu des anges, mais que la création eut lieu en une seule période.
¨ « Au commencement, Dieu créa le ciel et la terre ». Il y eut donc un commencement. La création n’est pas éternelle et c’est un article de foi.
¨ Dans la création il y a trois phases : l’œuvre de création proprement dite (« Au commencement Dieu créa le ciel et la terre »), l’œuvre de distinction dans les trois premiers jours (« Dieu sépara la lumière des ténèbres… ») et l’œuvre d’ornementation dans les trois jours qui suivent (« Que des luminaires brillent au firmament… »). Le septième jour, celui du repos, manifeste que la création tend vers sa fin ultime et que Dieu conserve ce qu’il a créé. Il met en lumière le gouvernement divin.
¨ L’œuvre de création : « La terre était informe et nue ». La plupart des Pères entendent par là que la matière a existé à l’état informe avant d’être revêtue des ornements et de la beauté qui brillèrent plus tard dans les créatures corporelles.
¨ L’œuvre du premier jour : Distinction entre la lumière et les ténèbres. La lumière, cette substance fluide, qualité que toute molécule de matière possède avec plus ou moins de quantité, apparaît au premier jour pour deux raisons : les jours ne pouvaient pas exister sans elle et elle devait manifester toutes les autres œuvres. La lumière primitive était celle de la matière à l’état informe. Saint Augustin s’écarte des autres Pères de l’Eglise pour voir dans cette lumière la création des anges.
¨ L’œuvre du deuxième jour : Distinction des eaux du dessous avec les eaux du dessus du firmament. Ce terme firmament vient de firmus, c’est-à-dire solide. Selon une interprétation probable, il s’agit ici de l’atmosphère, cette couche d’air qui environne la surface de la terre. Des eaux réduites en vapeur furent répandues dans l’atmosphère et elles donneront les pluies, les nuages, etc. Ces sont les eaux au-dessus du firmament. Les autres eaux restèrent confondues avec la terre et donneront bientôt la mer au troisième jour. Ce sont les eaux en dessous du firmament.
¨ L’œuvre du troisième jour : Distinction entre la mer et la terre et production des plantes. Les eaux qui étaient encore mêlées à la terre vont se réunir en un seul lieu, la mer (ce qui n’exclut pas les fontaines, les sources, les marécages, …). Rien n’empêche désormais l’ornementation et cela commencera de manière quelque peu insolite par les plantes. (Le troisième jour compte donc deux œuvres comme le sixième jour. Le parallélisme entre les trois premiers jours et les trois suivants est frappant). Nous voyons apparaître l’herbe, les plantes à graines et les arbres à fruits. Cela ne va pas sans quelques mystères : car les plantes ont besoin du soleil (peut-être que la lumière du premier jour suffisait) et des insectes pour être fécondes. Saint Augustin pense que les plantes ne furent pas produites avec toutes leurs espèces mais la terre reçut seulement la vertu de les produire (interprétation qui s’accorderait avec une certaine évolution). Saint Basile avance que les plantes furent créées avant le soleil pour bien montrer que cet astre n’était pas un dieu, que les plantes qui ont besoin du soleil et du mouvement des astres pour leur développement n’ont cependant pas été créé par eux.
¨ Le quatrième jour : Les luminaires qui brillent dans le firmament. Il y a insistance sur le soleil et la lune à cause de leur utilité. Ils président en effet au jour et à la nuit. La lumière fut produite le premier jour selon sa nature générale. Au quatrième, les astres obtiennent une vertu particulière pour la diffuser. Les luminaires sont destinés à illuminer le monde, le réchauffer, diviser les temps, les jours et les années. Les milliards d’étoiles sont l’ouvrage le plus spectaculaire pour l’homme. Elles font resplendir à un haut degré l’immensité de Dieu et les merveilles de sa Toute-Puissance. C’est pourquoi Moïse a soin de dire, dans le livre du Deutéronome : « Lorsque levant les yeux au ciel, tu verras le soleil, la lune et tous les astres du ciel, garde-toi de t’égarer jusqu’à adorer ou honorer ce que Dieu a créé pour l’utilité de toutes les nations. » (Deut. 4, 19) Comme le disait un petit enfant lorsqu’on lui montrait les étoiles : « Ça, c’est le dessous du Ciel. Que doit être le dessus là où Dieu est au milieu de sa cour céleste ! »
¨ Le cinquième jour : Les poissons et les oiseaux. Il s’agit de « l’ornementation » de l’eau et des airs. On aperçoit aisément le parallèle avec le deuxième jour. C’est la première production d’êtres sensibles.
¨ Le sixième jour : Les animaux terrestres et l’homme. C’est « l’ornementation » de la terre distinguée au troisième jour. Parmi ces animaux, certains semblent inutiles et dangereux. Saint Augustin répond : « Il y a ici-bas beaucoup de créatures qui, sans être utiles à nos usages, servent néanmoins à compléter l’univers (on appellera cela aujourd’hui l’écosystème). Avant le péché, l’homme en faisait un bon emploi ; rien n’était nuisible pour lui, pas même les animaux venimeux. »
L’homme, de toute la création, est le dernier à trouver place. Semblable aux créatures terrestres par son corps et aux anges par sa nature intellectuelle, il résume en lui toutes les natures créées. Dans un certain sens, Dieu y met toute son attention car il pense à son Fils bien aimé qui s’incarnera. Dieu créa l’homme « à son image et à sa ressemblance ». Ajoutons que l’âme humaine est créée directement par le Tout-Puissant et cette création continuera jusqu’au dernier homme.
« Et cela fut ainsi. Et Dieu vit que tout ce qu’il avait fait, et voici que cela était très bon. Et il y eut un soir, et il y eut un matin : ce fut le sixième jour.
Ainsi furent achevés le ciel et la terre, et toute leur armée. Et Dieu eut achevé le septième jour son œuvre qu’il avait faite, et il se reposa le septième jour de toute son œuvre qu’il avait faite. Et Dieu bénit le septième jour et le sanctifia, parce qu’en ce jour-là il s’était reposé de toute l’œuvre qu’il avait créée en la faisant. » (Gen. 1, 31 ; 2, 1-3)
Sacerdos